À la fin du XIXe et au début du XXe siècle, les principaux conflits qui agitent la société espagnole se donnent en représentation sur les scènes des deux grandes capitales, Madrid et Barcelone. La rivalité économique et politique entre les deux villes se voit ainsi redoublée d'une compétition culturelle. En retraçant l'histoire de ces conflits symboliques, cet ouvrage offre un éclairage singulier sur l'Espagne de la Restauration. Émancipé de sa tutelle politique, le théâtre se libéralise et devient plus populaire, donnant voix aux aspirations démocratiques tout en s'ouvrant au marché culturel international. Tandis que s'opposent dans le reste de l'Europe les avant-gardes et l'industrie culturelle, la bipolarisation espagnole met cette tension en spectacle.
Sumario
L'ESPACE DU THÉÂTRE
I.- Vers la fin de l'Ancien Régime culturel
II.- Du temple théâtral a la cabane de spectacle
CAPITAL ET TRAVAIL DANS L'INDUSTRIE THÉÂTRALE
III.- La nouvelle économie du spectacle
IV.- Les acteurs au sein du système théâtral
V.- Auteurs en quête d'autonomie
TERRITOIRES CULTURELS
VI.- Passeurs, faussaires et douaniers
VII.- Les représentations sexuées du national
LA COMMUNAUTÉ POLITIQUE AU SPECTACLE
VIII.- Chanter la nation, déclamer la démocratie
IX.- L'espace public des analphabètes
Reseñas
Annales
Nº 69-3, 2014
Si le théâtre du Siècle d'or est relativement bien connu en France, l'activité dramatique en Espagne au XIXe siècle l'est beaucoup moins, même parmi les spécialistes d'histoire des spectacles. Aussi l'ouvrage de Jeanne Moisand a le grand mérite de combler un vide bibliographique en langue française et de réintégrer l'Espagne dans une histoire européenne des spectacles au XIXe siècle. En outre, son étude permet de relativiser la théorie du retard espagnol à l'époque contemporaine. Dans une Espagne encore fortement marquée par l'analphabétisme jusqu'au début du XXe siècle, la très forte expansion de la production de spectacles entre 1870 et 1910 est bien évidemment un fait social, culturel et politique de toute première importance. […] Celui qui désormais voudra parcourir l'Europe des spectacles du XIXe siecle, de capitale en capitale, ne pourra plus faire autrement que de s'arrêter à Madrid et à Barcelone.
Jean-Claude Yon