Carte blanche

Les Proies de Marine de Contes

13DéCEMBRE 2019
TABAKALERA - DONOSTIA
Projection

Projection du film Les Proies, de Marine de Contes - Membre artiste 2019-2020

France - 2018 - 53'

Samedi 14 décembre - À 19h00

Entrée : 3,50 €
Plus d'information et achat des places

À la Tabakalera 
Plaza de las cigarreras, 1
20012. Donostia / San Sebastián

Film présenté par Marine de Contes (membre artiste de la Casa de Velázquez) et Fabienne Aguado (Directrice des études artistiques de la Casa de Velázquez)

 

Le film 

 

"Dans ce film, je présente au spectateur la vie des chasseurs de pigeons ramiers dans la forêt des Landes de Gascogne dans le sud-ouest de la France. Nous découvrirons l'endroit d'une manière particulière. En entrant dans la forêt saturée de chants d'oiseaux, nous ressentirons l'immensité du paysage qui nous transporte. Puis, les bruits étranges se mêleront au murmure des arbres. Nous aiguiserons nos oreilles et écouterons la forêt, devenant chasseurs, et dans la position du gardien, nous attendrons. Nous serons attentifs, avec une patience infinie, en attendant que quelque chose se passe.

Avant de tourner ce film, je connaissais la forêt landaise, son crépuscule, son odeur de résine d'arbre, ses pins majestueux qui se balancent doucement au vent, son silence peuplé par le chant des oiseaux et ses couleurs vives, mais je ne savais rien de la chasse. C'est lors d'un atelier vidéo dans les Landes que les jeunes participants m'ont parlé de la coutume locale d'attraper les oiseaux avec un filet. Ils m'ont montré une palombière, un pavillon de chasse construit sur le sol, camouflé avec des aiguilles de pin et des fougères et entouré de tunnels de plusieurs centaines de mètres de long dans toutes les directions. Intrigué par cette construction inattendue, qui ressemblait à la fois à un abri de guerre et à une maison de poupée, j'ai décidé de revenir à l'automne, pendant la saison de chasse, pour en apprendre davantage sur cette pratique ancestrale.

Dans cet espace labyrinthique, avec ses mécanismes complexes de leurres -des oiseaux qui montent et descendent en hissant câbles et poulies-, cette forêt, qui m'avait toujours semblé calme et sereine pendant mes promenades, s'est soudain révélée mystérieuse et angoissante.

Je voulais que le spectateur ressente la même chose : ignorant, curieux et anxieux, prêt à vivre une expérience sensorielle et à se laisser emporter par la relation particulière entre les hommes et la faune et le paysage qui les entoure. J'ai donc adapté ma manière de tourner à la stratégie des chasseurs : observer, approcher et capturer des moments précis. 

Même si j'ai utilisé une approche cinématographique, je cherche aussi à décoder une activité à la manière d'un film ethnographique. En fait, cette tradition familiale de chasse contient tous les éléments d'un rite qui se transmet de génération en génération. Elle pose la question de la tension entre tradition et modernité. 

Ce type de chasse, désuet et obsolète, semble un peu absurde car la quantité d'énergie utilisée par les chasseurs est disproportionnée par rapport aux rares prises. Même s'ils finissent par manger la proie, ils n'ont pas besoin de chasser pour survivre. Cependant, les chasseurs n'abandonnent pas. Ils passent deux mois dans leur hutte à scruter le ciel, espérant attraper des oiseaux vivants dans leurs filets ou, à défaut, en abattre. Il y a peut-être d'autres raisons dans cet espace isolé au milieu de la forêt.

Dans ce coin rural reculé de la France, dans cet espace décrit par les géographes comme "hyper-rural", les habitants ont conservé une langue (le gascon), une notion du temps, une relation étroite et immédiate avec l'environnement qui se transmet des parents aux enfants, mais qui est appelée à disparaître. C'est parce que la loi de la rentabilité défigure le paysage. L'écosystème risque de changer en raison de l'abattage de vastes étendues de pins. Le paradis du chasseur disparaît peu à peu et les pigeons ramiers changent les couloirs de migration. L'une des raisons de la création de ce film était d'enregistrer ce microcosme. Nous ne savons plus qui est la véritable proie du système."

Marine de Contes

 

 

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